Le débat sur la transition énergétique est une occasion unique de repenser les fondements de notre politique énergétique. Il est aussi une opportunité pour que chacun comprenne que les politiques publiques sont des choses trop importantes pour en laisser la responsabilité aux politiques ! La paraphrase peut paraître aisée, elle n’en n’est pas moins pertinente. Tout le monde s’accorde sur la nécessité de faire évoluer notre rapport à l’énergie, mais les décideurs considèrent encore trop souvent que cette question n’est pas du ressort des citoyens. Le sujet serait trop compliqué pour eux ! Nous considérons à l’inverse qu’il est indispensable que tous les acteurs de la société se saisissent de ces enjeux et contribuent, chacun à leur niveau, à la définition et à la mise en œuvre d’une nouvelle politique énergétique qui permettra de répondre aux questions auxquelles nous sommes confrontés.
L’impératif climatique s’est progressivement imposé comme une contrainte incontournable : nous devons diviser par 4 nos émissions de gaz à effet de serre avant 2050. Il en va de la pérennité de l’humanité. Les transformations qui seront nécessaires pour atteindre cet objectif sont telles que nous ne pourrons réussir que dans un vaste mouvement d’engagement collectif. Dans le même temps, les ressources énergétiques les plus couramment utilisées – pétrole et gaz - que l’on pensait abondantes et peu chères, s’épuisent et leur prix s’envole tirant la facture énergétique des entreprises et des ménages vers le haut. Cette incidence directe sur notre pouvoir d’achat et la compétitivité de nos entreprises – donc de nos emplois – est une motivation supplémentaire pour que chacun contribue à repenser l’avenir de notre société et le rapport à l’énergie autour duquel elle se construira.
La politique énergétique impulsée après la 2ème guerre mondiale, sans aucune concertation des acteurs de la société, montre aujourd’hui ses limites. La priorité donnée à la production électronucléaire nécessitait, du fait des capitaux mobilisés et par la nature même de la technologie choisie, un appareil de production strictement contrôlé par une autorité centrale, tenant les citoyens à distance. Elle a conduit à favoriser la consommation d’électricité produite en abondance pour des usages inappropriés, comme le chauffage domestique. Cette quasi-exclusivité donnée à l’atome a également stérilisé les hypothèses de diversification de l’offre énergétique, en même temps qu’elle a découragé les efforts pour réduire la consommation d’énergie dans le bâti ou les transports. Enfin, et c’est probablement le problème le plus aigüe que nous aurons à traiter dans les prochaines années, nos centrales ayant été mises en service sur une période courte – une vingtaine d’année –, elles arrivent au terme de leur durée de vie initialement programmée dans un espace temps également limité, imposant de fait un « mur d’investissement » pour leur remplacement – quelles que soient les options retenues pour ce remplacement. L’investissement pour la prolongation de leur durée d’exploitation de 10 – peut-être 20 ans-, est moins important mais il ne fait que retarder l’échéance du remplacement. On comprend aisément que dans le contexte actuel de crise économique il nous sera difficile d’affronter ce mur d’investissement. On comprend surtout qu’il sera nécessaire de construire un large consensus dans la société pour définir les options sur lesquelles nous devrons investir nos ressources collectives.
La 1ère des orientations à privilégier pour traiter l’équation énergétique consiste à réduire fortement nos besoins en énergie. En effet, il sera plus facile de restructurer la couverture de besoins diminués de 20, 30 voire 50%. Notons au passage qu’en réduisant la consommation énergétique nationale de 30% nous réduirons d’autant nos importations, améliorant ainsi de quelques 20 milliards d’Euros la balance commerciale : un choc de compétitivité à la Gallois chaque année ! Et surtout des ressources additionnelles pour financer la transition ! L’enjeu n’est pas mince.
Nous savons aujourd’hui que les principaux gisements d’économie d’énergie se situent dans le bâtiment et les transports. Mais nous savons aussi que pour aller au delà de 20% d’économie d’énergie en 2030, pour atteindre le facteur 4 en 2050, nous devrons repenser fondamentalement nos modes de vie, notre mobilité, notre consommation de biens et de services. Les besoins en énergie d’une société donnant la priorité à la sobriété et à l’efficacité, doivent être pensés, non pas en quantité d’énergie à consommer, mais en qualité de services énergétiques nécessaires au mode de vie que nous souhaitons pour nos enfants et nos petits enfants dans une société durablement réconciliée avec son environnement. Nous touchons ici la première raison d’associer tous les acteurs de la société civile à l’élaboration d’une politique ambitieuse d’économie d’énergie. Ce sont les citoyens et les associations dans lesquelles ils se regroupent qui pourront dessiner les contours de ces nouveaux modes de vies. C’est dans le dialogue et la concertation que nous verrons émerger les arbitrages entre ce qui relèvera de l’incitation et ce qui devra être imposé par la contrainte. L’exemple, très concret, de la limitation de l’usage de la voiture particulière dans les centres de ville par l’instauration d’un péage urbain, n’est que la préfiguration de ces arbitrages collectifs que nous devrons construire avec un maximum de sérénité.
Le débat national sur la transition énergétique, dont les délais sont trop courts, ne permettra pas d’aborder tous les arbitrages nécessaires ou souhaitables. Pour autant, on peut penser que la société civile puisse, à cette occasion, se mettre en mouvement pour porter au débat, maintenant et plus tard, les sujets qui devront faire l’objet de ces arbitrages… les citoyens décidant ensemble du futur qu’ils souhaitent, plutôt que se voir imposer des décisions autoritaires traduisant la nécessité d’économies collectives.
Nous savons aujourd’hui que les principaux gisements d’économie d’énergie se situent dans le bâtiment et les transports. Mais nous savons aussi que pour aller au delà de 20% d’économie d’énergie en 2030, pour atteindre le facteur 4 en 2050, nous devrons repenser fondamentalement nos modes de vie, notre mobilité, notre consommation de biens et de services. Les besoins en énergie d’une société donnant la priorité à la sobriété et à l’efficacité, doivent être pensés, non pas en quantité d’énergie à consommer, mais en qualité de services énergétiques nécessaires au mode de vie que nous souhaitons pour nos enfants et nos petits enfants dans une société durablement réconciliée avec son environnement. Nous touchons ici la première raison d’associer tous les acteurs de la société civile à l’élaboration d’une politique ambitieuse d’économie d’énergie. Ce sont les citoyens et les associations dans lesquelles ils se regroupent qui pourront dessiner les contours de ces nouveaux modes de vies. C’est dans le dialogue et la concertation que nous verrons émerger les arbitrages entre ce qui relèvera de l’incitation et ce qui devra être imposé par la contrainte. L’exemple, très concret, de la limitation de l’usage de la voiture particulière dans les centres de ville par l’instauration d’un péage urbain, n’est que la préfiguration de ces arbitrages collectifs que nous devrons construire avec un maximum de sérénité.
Le débat national sur la transition énergétique, dont les délais sont trop courts, ne permettra pas d’aborder tous les arbitrages nécessaires ou souhaitables. Pour autant, on peut penser que la société civile puisse, à cette occasion, se mettre en mouvement pour porter au débat, maintenant et plus tard, les sujets qui devront faire l’objet de ces arbitrages… les citoyens décidant ensemble du futur qu’ils souhaitent, plutôt que se voir imposer des décisions autoritaires traduisant la nécessité d’économies collectives.
La modification du bouquet énergétique est le 2ème grand levier de la transition énergétique : réduction des combustibles fossiles et du nucléaire, et développement massif des énergies renouvelables. Ce développement devra se faire en 3D : diversification, déconcentration et décentralisation.
Diversification, car il nous faudra mobiliser toutes les solutions possibles sans exclusive pour répondre aux trois grands domaines d’usages ou de services énergétique dont nous avons besoin : chaleur (domestique et industrielles), mobilité et électricité spécifique. On ne peut réduire, comme cela est trop souvent le cas, l’avenir de la politique énergétique à une alternative entre éolien et nucléaire… La résilience de notre politique énergétique dépendra de la multiplicité des options mobilisées pour éviter de n’être dépendant d’aucune en particulier. Il nous faut donc penser solaire thermique et photovoltaïque, géothermie profonde, récupération de la chaleur des réseaux d’eaux usées, éolien terrestre et off shore, biomasse, énergies marines, micro-éoliennes intégrées au bâti, micro-hydraulique…
Déconcentration parce que nous devrons enfin admettre que la production d’énergie (notamment d’électricité) à partir de sources multiples de potentiel unitaire réduit, est aussi intéressante que la production permise par de grosses unités en nombre limité. Si en terme purement mathématique 100 fois 10 égale 10 fois 100, un système énergétique dépendant de 100 sources de diverses natures sera probablement plus solide, plus résistant, plus résilient.
Décentralisation enfin, comme conséquence logique de la diversification et de la déconcentration, parce que, par nature la production d’énergie renouvelable se fait nécessairement là où les ressources sont effectivement exploitables.
Diversification, car il nous faudra mobiliser toutes les solutions possibles sans exclusive pour répondre aux trois grands domaines d’usages ou de services énergétique dont nous avons besoin : chaleur (domestique et industrielles), mobilité et électricité spécifique. On ne peut réduire, comme cela est trop souvent le cas, l’avenir de la politique énergétique à une alternative entre éolien et nucléaire… La résilience de notre politique énergétique dépendra de la multiplicité des options mobilisées pour éviter de n’être dépendant d’aucune en particulier. Il nous faut donc penser solaire thermique et photovoltaïque, géothermie profonde, récupération de la chaleur des réseaux d’eaux usées, éolien terrestre et off shore, biomasse, énergies marines, micro-éoliennes intégrées au bâti, micro-hydraulique…
Déconcentration parce que nous devrons enfin admettre que la production d’énergie (notamment d’électricité) à partir de sources multiples de potentiel unitaire réduit, est aussi intéressante que la production permise par de grosses unités en nombre limité. Si en terme purement mathématique 100 fois 10 égale 10 fois 100, un système énergétique dépendant de 100 sources de diverses natures sera probablement plus solide, plus résistant, plus résilient.
Décentralisation enfin, comme conséquence logique de la diversification et de la déconcentration, parce que, par nature la production d’énergie renouvelable se fait nécessairement là où les ressources sont effectivement exploitables.
L’acceptation de l’évolution d’un nouveau bouquet énergétique faisant une place accrue à ces énergies renouvelables en 3D nécessite aussi une forte mobilisation de la société civile. L’hypercentralisation du système énergétique que nous connaissions jusqu’à maintenant permettait d’imposer les décisions formulées en haut lieu d’autant plus facilement que le nombre d’unité de production d’énergie était limité - concentration oblige – et que les oppositions potentielles étaient alors facilement circonscrites. La déconcentration et la décentralisation des unités de production supposent une multiplication des lieux de production d’énergie et une diversification des nuisances possibles. Par conséquent, la mobilisation des citoyens est indispensable pour construire l’acceptabilité locale des solutions proposées. Cette concertation permet d’anticiper la contestation, souvent motivée par le rejet de désagréments localisés qui tend à ignorer l’intérêt général des installations contestées. Le foisonnement des oppositions aux différents projets de parcs éoliens illustre bien cette logique du NIMBY : Not in my backyard ! (Pas dans mon jardin !).
Pourtant, constatant qu’aucune production d’énergie ne vient sans son lot d’avantages et d’inconvénients, il faudra bien que nous apprenions collectivement à arbitrer – là encore – entre les différents inconvénients générés pour la production d’énergie dont nous déclarons avoir besoin. Dans ce domaine le rôle des associations de protection de l’environnement est essentiel. D’une part, ce sont elles qui permettent de considérer avec attention les diverses nuisances qu’il faut apprendre à gérer. D’autre part, ce sont aussi elles qui doivent nous aider à choisir entre différentes combinaisons d’avantages et d’inconvénients, en proposant si cela est nécessaire une nouvelle hiérarchisation des impératifs de protection de l’environnement. Les possibles concessions pour assouplir certaines règles logiquement contraignantes de loi littorale, dans le seul but de permettre l’implantation d’éoliennes à proximité du trait de côte, justement là où ces machines seront très efficaces, illustre bien les nouvelles priorités à établir pour mieux servir l’intérêt général.
Pourtant, constatant qu’aucune production d’énergie ne vient sans son lot d’avantages et d’inconvénients, il faudra bien que nous apprenions collectivement à arbitrer – là encore – entre les différents inconvénients générés pour la production d’énergie dont nous déclarons avoir besoin. Dans ce domaine le rôle des associations de protection de l’environnement est essentiel. D’une part, ce sont elles qui permettent de considérer avec attention les diverses nuisances qu’il faut apprendre à gérer. D’autre part, ce sont aussi elles qui doivent nous aider à choisir entre différentes combinaisons d’avantages et d’inconvénients, en proposant si cela est nécessaire une nouvelle hiérarchisation des impératifs de protection de l’environnement. Les possibles concessions pour assouplir certaines règles logiquement contraignantes de loi littorale, dans le seul but de permettre l’implantation d’éoliennes à proximité du trait de côte, justement là où ces machines seront très efficaces, illustre bien les nouvelles priorités à établir pour mieux servir l’intérêt général.
En observant ses deux principaux leviers – réduction des consommations et développement des renouvelables - on comprend aisément que les collectivités locales ont un rôle prépondérant dans la conception et la mise en œuvre de la transition énergétique. D’une part, elles constituent l’espace de proximité entre les acteurs – citoyens, entreprises, associations – qui permettra d’encourager les efforts de sobriété et d’efficacité et de dessiner les mutations des modes de vie nécessaire à l’ampleur des réductions de consommations d’énergie que nous devons atteindre. D’autre part, c’est aussi à échelle « locale » que se construiront les arbitrages en faveur de telle ou telle solution d’énergie renouvelable, en conduisant les acteurs à accepter certaines nuisances en contre partie des bénéfices collectifs des choix retenus.
Les Plans Climat Energie Territoriaux ont bien montré la possibilité de construire démocratiquement des stratégies d’action permettant de couvrir les besoins en énergie d’un territoire en respectant les enjeux environnementaux essentiels, du local au global et en prenant en compte les enjeux sociaux. Ces processus de concertation ont surtout fait la preuve que le caractère collaboratif de la construction de ces nouvelles politiques énergétiques est la condition incontournable de leur succès à terme. Car demain, ce seront bien les entreprises, les coopératives agricoles, les associations de quartier, les groupes de consommateurs, les citoyennes et les citoyens qui mettront en œuvre, en pratique, les ressorts de cette transition.
Les Plans Climat Energie Territoriaux ont bien montré la possibilité de construire démocratiquement des stratégies d’action permettant de couvrir les besoins en énergie d’un territoire en respectant les enjeux environnementaux essentiels, du local au global et en prenant en compte les enjeux sociaux. Ces processus de concertation ont surtout fait la preuve que le caractère collaboratif de la construction de ces nouvelles politiques énergétiques est la condition incontournable de leur succès à terme. Car demain, ce seront bien les entreprises, les coopératives agricoles, les associations de quartier, les groupes de consommateurs, les citoyennes et les citoyens qui mettront en œuvre, en pratique, les ressorts de cette transition.
Voilà pourquoi le débat national engagé par le gouvernement doit aussi être un moment de pédagogie collective. Les enjeux énergétiques sont certes complexes, mais ils concernent tout le monde. L’énergie est au cœur de nos vies. Nous sommes tous interpellés par notre facture d’énergie. Nous sommes tous sensibles aux impacts sociaux et environnementaux des choix technologiques opérés. Nous sommes donc tous engagés par les arbitrages collectifs nécessaires pour satisfaire nos besoins en énergie dans une société qui devra faire la paix avec son environnement.
Débat
En remettant en cause le régime fiscal dérogatoire pour le diesel en France, la Cour des comptes met le gouvernement au pied du mur de la transition écologique.
Tribune publiée le mardi 5 mars sur Rue 89
L’analyse est limpide :
- d’une part, la défiscalisation du diesel constitue un manque à gagner de 7 à 8 milliards d’euros et encourage l’usage d’un carburant dont on connaît maintenant la nocivité pour l’environnement et la santé publique ;
- d’autre part, on apprend au passage que le malaise des raffineries françaises – et la faillite de Petroplus – vient du fait que nous produisons en France trop d’essence que nous ne consommons pas, et pas assez de diesel que nous devons importer, aggravant un peu plus notre déficit commercial ;
- enfin, l’industrie automobile française est très mal en point, notamment parce qu’elle n’a pas su anticiper les mutations qui s’annonçaient, autrement qu’en faisant du Fordisme à l’envers : délocalisant la production de véhicules peu chers vers des pays à main d’œuvre sous payée.
- d’une part, la défiscalisation du diesel constitue un manque à gagner de 7 à 8 milliards d’euros et encourage l’usage d’un carburant dont on connaît maintenant la nocivité pour l’environnement et la santé publique ;
- d’autre part, on apprend au passage que le malaise des raffineries françaises – et la faillite de Petroplus – vient du fait que nous produisons en France trop d’essence que nous ne consommons pas, et pas assez de diesel que nous devons importer, aggravant un peu plus notre déficit commercial ;
- enfin, l’industrie automobile française est très mal en point, notamment parce qu’elle n’a pas su anticiper les mutations qui s’annonçaient, autrement qu’en faisant du Fordisme à l’envers : délocalisant la production de véhicules peu chers vers des pays à main d’œuvre sous payée.
L’avenir est dans d’autres approches de la mobilité
Dans ce contexte, la déclaration de notre ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg (« attaquer le diesel, c’est attaquer le made in France, car nous sommes les meilleurs en diesel ») est vraiment pathétique.
Serions nous fiers d’être les champions du monde du cancer induit par les microparticules d’un parc auto majoritairement diésélisé du fait d’une politique fiscale iconoclaste ? Aurions nous déjà oublié les effets de l’amiante sur la santé des travailleurs et les comptes de la sécurité sociale ?
Nous aurions pu attendre d’un ministre en charge de l’avenir industriel qu’il regarde un peu au delà du col de sa chère marinière et qu’il engage avec les industriels du secteur une réflexion prospective sur l’avenir de la mobilité. Il aurait pu prendre exemple sur cet entrepreneur français qui depuis des années proposait un véhicule à usage urbain fonctionnant à l’air comprimé et qui a finalement trouvé preneur… en Inde.
Il pourrait s’inspirer du succès bien français de la Bluecar testée avec le système Autolib sur Paris et qui préfigure non seulement un autre modèle de véhicule, mais surtout une autre approche de la mobilité.
Nous pourrions espérer que le gouvernement saisisse l’opportunité du questionnement ouvert par la Cour des comptes pour impulser un processus concret de transition écologique et sociale appliqué à l’industrie automobile.
Dans ce contexte, la déclaration de notre ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg (« attaquer le diesel, c’est attaquer le made in France, car nous sommes les meilleurs en diesel ») est vraiment pathétique.
Serions nous fiers d’être les champions du monde du cancer induit par les microparticules d’un parc auto majoritairement diésélisé du fait d’une politique fiscale iconoclaste ? Aurions nous déjà oublié les effets de l’amiante sur la santé des travailleurs et les comptes de la sécurité sociale ?
Nous aurions pu attendre d’un ministre en charge de l’avenir industriel qu’il regarde un peu au delà du col de sa chère marinière et qu’il engage avec les industriels du secteur une réflexion prospective sur l’avenir de la mobilité. Il aurait pu prendre exemple sur cet entrepreneur français qui depuis des années proposait un véhicule à usage urbain fonctionnant à l’air comprimé et qui a finalement trouvé preneur… en Inde.
Il pourrait s’inspirer du succès bien français de la Bluecar testée avec le système Autolib sur Paris et qui préfigure non seulement un autre modèle de véhicule, mais surtout une autre approche de la mobilité.
Nous pourrions espérer que le gouvernement saisisse l’opportunité du questionnement ouvert par la Cour des comptes pour impulser un processus concret de transition écologique et sociale appliqué à l’industrie automobile.
Aider les ménages à se séparer de leurs vieux diesel
Ce processus nécessite de combiner des mesures de court terme pour impulser la mutation, et des propositions structurantes pour consolider le succès à long terme des opérateurs français de mobilité. A court terme, nous pourrions utiliser une part des recettes de la fiscalité diesel restaurée pour aider les ménages modestes à changer leur vieux diesel pour un modèle essence plus économe et moins polluant.
Une retour sur les hoquets du développement du solaire photovoltaïque s’impose ici. Nathalie Kosciusko-Morizet avait tordu le coup aux tarifs incitatifs au motif qu’ils finançaient les usines chinoises de panneaux solaires. Elle oubliait au passage que la valeur du panneau ne représente que 20 à 30% du coût de l’installation et que la plupart des emplois créés en France étaient des emplois de service (conception, ingénierie, maintenance…).
Sa décision a détruit plus de 12 000 emplois en quelques mois. Il ne faudrait pas que Montebourg refuse d’imaginer des aides à l’abandon des véhicules diesel au seul motif – comme il l’a déjà évoqué – que ces changements favoriseraient des véhicules bon marché produits hors de France. La mesure d’urgence, pour impulser le changement, devrait donc s’accompagner d’un engagement de l’industrie automobile à rapatrier en France la production de véhicules essence ou hybride, légers et économes.
Ce processus nécessite de combiner des mesures de court terme pour impulser la mutation, et des propositions structurantes pour consolider le succès à long terme des opérateurs français de mobilité. A court terme, nous pourrions utiliser une part des recettes de la fiscalité diesel restaurée pour aider les ménages modestes à changer leur vieux diesel pour un modèle essence plus économe et moins polluant.
Une retour sur les hoquets du développement du solaire photovoltaïque s’impose ici. Nathalie Kosciusko-Morizet avait tordu le coup aux tarifs incitatifs au motif qu’ils finançaient les usines chinoises de panneaux solaires. Elle oubliait au passage que la valeur du panneau ne représente que 20 à 30% du coût de l’installation et que la plupart des emplois créés en France étaient des emplois de service (conception, ingénierie, maintenance…).
Sa décision a détruit plus de 12 000 emplois en quelques mois. Il ne faudrait pas que Montebourg refuse d’imaginer des aides à l’abandon des véhicules diesel au seul motif – comme il l’a déjà évoqué – que ces changements favoriseraient des véhicules bon marché produits hors de France. La mesure d’urgence, pour impulser le changement, devrait donc s’accompagner d’un engagement de l’industrie automobile à rapatrier en France la production de véhicules essence ou hybride, légers et économes.
Demain, la voiture sera service
A long terme nous devrions nous attacher à développer les solutions de mobilité privilégiant l’économie de service – commercialisation d’une solution de mobilité – à la vente « classique » du véhicule. Il faudra alors proposer tous les accompagnements nécessaires à la mise en œuvre de ces solutions fondées sur l’usage, la multi-modalité, le recours préférentiel aux transports collectifs. Les acteurs français des transports, de la distribution, de la connectique et de la communication seraient aux premières loges pour créer des emplois dans ces secteurs.
La nouveauté sera ici de ne pas focaliser sur les seuls emplois industriels de production de véhicules mais d’explorer toutes les pistes ouvertes par le développement de ces services.
Certes cette mutation aura un coût. Il pourrait être couvert en partie par la fiscalité diesel restaurée. Surtout ce coût devrait être mise en regard des coûts de l’inaction, ou pour reprendre le propos de notre Montebourg national, le coût de notre prétendue excellence française.
Que seront demain les dépenses de santé publique imposées par le traitement des pathologies respiratoires liées aux microparticules de diesel ? Que coûtera la prise en charge des chômeurs produits par une industrie automobile déclassée par l’évolution des services de mobilité ?
Il n’y a plus aucun doute, même pour le diesel, le changement c’est maintenant !
A long terme nous devrions nous attacher à développer les solutions de mobilité privilégiant l’économie de service – commercialisation d’une solution de mobilité – à la vente « classique » du véhicule. Il faudra alors proposer tous les accompagnements nécessaires à la mise en œuvre de ces solutions fondées sur l’usage, la multi-modalité, le recours préférentiel aux transports collectifs. Les acteurs français des transports, de la distribution, de la connectique et de la communication seraient aux premières loges pour créer des emplois dans ces secteurs.
La nouveauté sera ici de ne pas focaliser sur les seuls emplois industriels de production de véhicules mais d’explorer toutes les pistes ouvertes par le développement de ces services.
Certes cette mutation aura un coût. Il pourrait être couvert en partie par la fiscalité diesel restaurée. Surtout ce coût devrait être mise en regard des coûts de l’inaction, ou pour reprendre le propos de notre Montebourg national, le coût de notre prétendue excellence française.
Que seront demain les dépenses de santé publique imposées par le traitement des pathologies respiratoires liées aux microparticules de diesel ? Que coûtera la prise en charge des chômeurs produits par une industrie automobile déclassée par l’évolution des services de mobilité ?
Il n’y a plus aucun doute, même pour le diesel, le changement c’est maintenant !
COMMENTAIRES COMPLEMENTAIRES
Cette tribune aura moins eu un impact : celui de générer de nombreuses réactions. Toutes les critiques sont recevables et bonnes à prendre. Il y en a cependant une que je récuse : celle réduisant mon propos à celui d'un bobo parisien.
J'assume mon statut d'écologiste CSP+. Je travaille à Paris et même si je vis de "l'autre coté du périphérique" je reconnais également que mon expérience quotidienne de la mobilité est bien celle d'un urbain. Mon expérience professionnel m'a cependant conduit à travailler dans des zones rurales et notamment à réfléchir aux enjeux de mobilité dans ces territoires. Aussi, je maintiens mon propos. Il faut abandonner le diesel et repenser la mobilité comme un service dans les grandes villes, dans les petites bourgades et dans les zones rurales.
Ce changement de paradigme en terme de mobilité devra associer des mesures d'aménagement du territoire, de réorganisation de l'urbanisation, de dynamisation du réseau ferroviaire de proximité et de développement de nouveaux services. Tout cela ne se fera pas en un jour bien sur. Il faudra 15 - 20 ans pour faire évoluer nos modes de déplacement et c'est bien pour cela qu'il faut engager cette mutation au plus vite.
Dans cette évolution il restera évidemment des véhicules individuels, notamment pour les menages vivant en zones rurales ou en grande banlieue, éloignés des services de mobilités qui se seront développés. Pour couvrir ces besoins, il faudra bien que nos industries se soient convertis à la production - en France évidemment - de voitures peu consommatrices et donc accessibles à l'achat même pour les ménages les plus modestes. Ce redéploiement industriel pourrait sauver les emplois que l'industrie automobile est en train actuellement de détruire. Enfin, puisque nous avons su mettre en place au nom des valeurs républicaines d'égalité et de solidarité la péréquation tarifaire en matière d'énergie, pourquoi ne pourrions nous pas imaginer une forme de "péréquation mobilité" compensant les dépenses de déplacement contraint de ceux qui habitent loin des services de mobilité.
Deux dernières remarques pour compléter mon propos. La première pour rappeler comme certains commentateurs l'on fait qu'il faut aussi travailler sur les transports de marchandises pour privilégier la voie ferrée ou la voie d'eau à la route et optimiser la (petite) part de transport qui restera sur la route. La seconde pour souligner surtout que cette mutation ne se fera pas en six mois mais en une décennie au moins. Nous avons beaucoup de mal à imaginer aujourd'hui le "pas de temps" sur lequel ces transformations devront s'opérer. Nous devons apprendre à nous adapter en anticipant au mieux les changements de comportements, l'évolution des règles, les transformations industrielles et l'accompagnement des mutations de compétences qui seront nécessaires.
C'est bien cette capacité à changer qui nous manque aujourd'hui... Et nous devrons apprendre vite, ou bien nous n'aurons d'autres choix que de nous enfoncer dans le chaos durablement !
Bruno Rebelle |
|
Directeur de Transitions, agence conseil en développement durable Ancien responsable de Greenpeace en France et à l'international |
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| Par Bruno REBELLE | Lundi 8 Avril 2013 à 08:48 | 0 commentaire