Oui, Jean Pierre Dupuy a raison : le concept même du principe de précaution – tel qu’il est actuellement compris et mis en œuvre – est « débile ». Dans le texte publié dans Libération du 16 septembre, le philosophe engagé se livre à une attaque en règle du principe de précaution. Mais la lecture attentive de son texte, et la mise en regard de cet article avec ces nombreux écrits sur le sujet, montre bien son attachement à la précaution et surtout au principe de responsabilité. Ce sont bien les interprétations actuelles qui sont faites par les « technicistes » et les « scientistes » promoteurs du progrès à tout prix, interprétations relayées par la plupart des décideurs politiques qui, de fait, affaiblissent considérablement le principe de précaution et en altère le concept, tel qu’il découle du « principe responsabilité » formulé par Hans Jonas. Ces interprétations erronées détournent effectivement le principe de précaution en le décrivant comme principe d’inaction, générant de facto critiques, controverses et réticences. Ces dérives conduisent également à des confusions fâcheuses entre précaution – gestion d’un risque supposé mais encore mal connu - et prévention – traitement d’un risque avéré.
Comment ne pas suivre Jean Pierre Dupuy quand il nous dit qu’il est faux de penser que « ce qui empêche les décideurs d’agir, c’est l’incertitude ». On voit bien que sur de nombreux sujets le risque est avéré – connu, réel, cerné…- et qu’en dépit de ces certitudes le politique reste inactif : changement climatique, contamination génétique par les OGM, prolifération nucléaire… pour ne citer que ceux là.
Bien évidemment, le risque zéro n’existe pas. Bien évidemment la société s’est toujours construite dans une dialectique complexe entre bénéfices escomptés et risques supposés de telle ou telle composante du progrès socio technique. Le principe de précaution devrait, dans le même temps, conduire à deux types de pratiques dans les champs scientifiques et politiques. D’une part, il devrait guider les politiques de recherche pour mieux comprendre les risques et donc en cerner la possible – ou impossible maîtrise. D’autre part, guider la décision politique et refreiner effectivement l’utilisation de procédés ou produits pour lesquels des risques, pour la santé, pour l’environnement, pour la société ont été identifiés, en particulier lorsque l’ampleur et l’impact de ces risques n’auraient pas été clairement cernés.
C’est probablement en approfondissant la compréhension des risques par la société et les modalités de gestion politique de ces risques – c’est à dire l’identification du bon équilibre entre l’espérance de certains bénéfices et l’acceptation de certains effets néfastes ou de certaines conséquences fâcheuses, que l’on pourra progresser vers une société de responsabilité, une société dans laquelle le principe de précaution sera un des éléments du contrat social. Sans nul doute, la hauteur de vue et la pertinence de l’analyse de Jean Pierre Dupuy devrait nous apporter beaucoup pour poursuivre ce débat.
Comment ne pas suivre Jean Pierre Dupuy quand il nous dit qu’il est faux de penser que « ce qui empêche les décideurs d’agir, c’est l’incertitude ». On voit bien que sur de nombreux sujets le risque est avéré – connu, réel, cerné…- et qu’en dépit de ces certitudes le politique reste inactif : changement climatique, contamination génétique par les OGM, prolifération nucléaire… pour ne citer que ceux là.
Bien évidemment, le risque zéro n’existe pas. Bien évidemment la société s’est toujours construite dans une dialectique complexe entre bénéfices escomptés et risques supposés de telle ou telle composante du progrès socio technique. Le principe de précaution devrait, dans le même temps, conduire à deux types de pratiques dans les champs scientifiques et politiques. D’une part, il devrait guider les politiques de recherche pour mieux comprendre les risques et donc en cerner la possible – ou impossible maîtrise. D’autre part, guider la décision politique et refreiner effectivement l’utilisation de procédés ou produits pour lesquels des risques, pour la santé, pour l’environnement, pour la société ont été identifiés, en particulier lorsque l’ampleur et l’impact de ces risques n’auraient pas été clairement cernés.
C’est probablement en approfondissant la compréhension des risques par la société et les modalités de gestion politique de ces risques – c’est à dire l’identification du bon équilibre entre l’espérance de certains bénéfices et l’acceptation de certains effets néfastes ou de certaines conséquences fâcheuses, que l’on pourra progresser vers une société de responsabilité, une société dans laquelle le principe de précaution sera un des éléments du contrat social. Sans nul doute, la hauteur de vue et la pertinence de l’analyse de Jean Pierre Dupuy devrait nous apporter beaucoup pour poursuivre ce débat.
Bruno Rebelle |
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Directeur de Transitions, agence conseil en développement durable Ancien responsable de Greenpeace en France et à l'international |
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| Par Bruno Rebelle | Vendredi 17 Septembre 2010 à 16:18 | 0 commentaire